Titre de l'article :

Les associations de maladies entre abeilles et bourdons en tant que menaces pour les pollinisateurs sauvages.


Introduction à l'article :

L'émergence et le développement de maladies infectieuses depuis le bétail aux populations naturelles est une des principales sources de maladies infectieuses émergentes (ou MIE). Il y a eu ces dernières années d'importantes pertes dans plusieurs populations d'abeilles domestiques, une proposition étant que les MIE en sont un acteur majeur, notamment par le virus des ailes déformées (ou DWV) et le Nosema ceranae (un champignon unicellulaire). Les abeilles sont présentes à travers le monde à des fins agronomiques et partagent leurs ressources avec des pollinisateurs sauvages, facilitant une transmission interspécifique de ces pathogènes ; les MIE chez les abeilles sont donc une menace potentielle pour les pollinisateurs sauvages. Bien qu'il ait été montré que des pollinisateurs comme le bourdon puissent déjà porter certains pathogènes, le pouvoir infectieux et la distribution à grande échelle de ces virulentes MIE chez les populations de pollinisateurs naturels restent inconnus.

Expériences de l'article :

Pour examiner le potentiel des pathogènes de l'abeille à traverser les limites hôtes-gènes, le pouvoir infectieux du DWV et de N. ceranae a été testé par inoculation chez des individus contrôles de l'espèce la plus représentée en Grande-Bretagne de bourdon (Bombus terrestris). Une sondage dans 26 sites de Grande-Bretagne a été mené pour évaluer la prévalence (la proportion d'individus touchés) de ces MIE (en distinguant présence et activité infectieuse du DWV, pouvant être présent mais inactif) chez les abeilles et bourdons, en termes de proportion, de distribution géographique des zones d'infection majeure et d'interactions entre types de prévalences et types de porteurs (abeille ou bourdon). Enfin, pour tester le fait qu'une prévalence en DWV soit expliquée par des transmissions locales entre espèces (dans un même site), des individus de chaque espèce ont été séquencés pour 5 sites ; s'il y a transmission, les deux espèces devraient partager les mêmes variants de souches virales.

Résultats de l'article :

Le DWV est infectieux chez ce bourdon (avec les mêmes effets que chez l'abeille), ainsi que N. ceranae. Le DWV est présent chez 36% des échantillons d'abeilles (et actif dans 88% d'entre eux) et 11% des bourdons (actif dans 38% d'entre eux). N. ceranae n'est présent que chez 9% des échantillons d'abeilles et 7% des échantillons de bourdons. Il n'y a pas de groupement spatial de la présence des pathogènes chez les abeilles, de même pour la présence du DWV chez les bourdons mais il y a un faible groupement pour les DWV actifs et un fort groupement pour N. ceranae chez ces bourdons. Il apparaît que la prévalence du DWV chez les abeilles a un fort effet positif sur celle chez les bourdons, et la prévalence de N. ceranae chez l'abeille influe sur celle chez les bourdons via l'abondance en abeilles. Pour la dernière expérience, une phylogénie par maximum de vraisemblance supporte fortement des groupements par site plutôt que par espèce-hôte (il y a une transmission entre espèces dans les sites).

Rigueur de l'article :

Les auteurs mettent en avant que le DWV cause une incapacité au vol et les individus auraient été sous-estimés par l'échantillonnage, et la prévalence qu'ils estiment l'est aussi. Ils indiquent aussi qu'une autre étude a vu une forte prévalence de N. ceranae chez les bourdons alors que ce n'est pas le cas ici ; ceci pourrait être expliqué par l'utilisation, ici, de jeunes individus alors que l'autre article ne vérifiait pas l'âge des individus, indiquant une susceptibilité différentielle selon l'âge chez ce bourdon, comme cela a aussi pu être suggéré pour les abeilles.

Ce que cet article apporte au débat :

Il y a un problème émergent concernant les pathogènes chez les pollinisateurs sauvages qui pourraient être apporté par l'abeille. Les résultats ne démontrent pas un sens de transmission entre espèces, mais la forte prévalence du DWV chez les abeilles est cohérente avec l'hypothèse qu'elles sont une source majeure d'infections pour les communautés de pollinisateurs. La prévalence en N. ceranae chez le bourdon dépend positivement de l'abondance en abeilles mais uniquement quand la prévalence est faible chez elles, suggérant un potentiel effet de saturation environnementale. Le développement des MIE pourrait être une cause majeure de mortalité des pollinisateurs sauvages là où des abeilles domestiques sont gérées et maintenues. Cette étude ne concerne que la Grande-Bretagne mais les prérequis pour que les abeilles soient une source et un réservoir en MIE est présente ici à l'échelle globale, et le commerce concernant les abeilles les bourdons commerciaux pourrait exacerber cet impact.

Publiée il y a plus de 6 ans par J. Maugoust.
Dernière modification il y a plus de 6 ans.