Viabilité post-glaciaire et colonisation de l'Amérique du Nord par un corridor sans glaces
Une hypothèse fréquemment évoquée soutient l'idée que de grandes migrations humaines auraient eu lieu en Amérique du Nord à travers un corridor ouvert entre deux calottes glaciaires. Les premiers américains, les Clovis, auraient ainsi emprunté ce corridor il y a près de 14 000 ans. Des travaux plus récents réfutent cette idée au regard de découvertes archéologiques indiquant des présences humaines à des dates antérieures.
En déterminant l'époque à laquelle le corridor s'est ouvert et a été colonisé par la faune et la flore, l'objectif est de savoir quand aurai-t-il pu permettre de telles migrations. La présence de certains biomes et de faune tels que bisons ou mammouths constitue une condition pour la viabilité du corridor pour des migrations humaines.
Une approche paléontologique et paléopalynologique (étude des grains de pollens fossiles) permet d'identifier les climats et les faunes du corridor à différentes époques, grâce à l'étude de sédiments des lacs de cette région.
Les sédiments de neufs lacs glaciaires situés à l'emplacement de l'ancien corridor ont été échantillonnés.
Dans chacun des sédiments ont été analysés les micros et macro fossiles, les pollens et également de l'ADN environnemental (traité par Barcoding). Des mesures de sensibilité au magnétisme ont également été effectuées, et des éléments ont été datés par datation absolue au Carbone14.
Les différentes analyses effectuées et notamment l'ADN environnemental indiquent la présence de steppes supportant une grande variété d'animaux notamment des bisons et des lièvres il y a près de 12 500 ans. Le corridor s'est physiquement ouvert il y a entre 15 000 et 14 000 ans, mais la déglaciation a été suivie par de grandes phases d'inondations durant près de 2000 ans.
Le corridor n'était donc pas viable pour des migrations humaines il y a 14 000 ans et n'a pas pu permettre la colonisation de l'Amérique par les peuples déjà présents au sud de ce corridor à cette époque. Le corridor a néanmoins pu permettre des migrations il y a 12 500 ans, ce qui concorde avec la datation des sites archéologiques les plus vieux identifiés sur le site.
La non viabilité du corridor il y a 14 000 ans implique que les premières populations humaines ayant colonisé l'Amérique ont utilisé d'autres voies de migration : une migration par la côte est l'hypothèse privilégiée par les auteurs.
La viabilité du corridor il y a 12 500 a pu permettre une seconde phase de colonisation vers le sud, mais également une remontée vers le Nord de populations déjà présentes au Sud et ainsi un flux génétique entre ces populations. Ces migrations concordent avec la divergence génétique entre les populations du Nord et du Sud, proposée par l'article de Raghavan, M. et al.
En s'intéressant à la viabilité du corridor, cet article répond à des questions soulevées en 2005 par l'article de Lawrence Guy Straus, David J. Meltzer et Ted Goebel.