Comparaison de la performance de pollinisateurs natif et domestiqué de l'Haskap (Lonicera caerulea : Caprifoliaceae), une culture fruitière en émergence
L'Haskap, ou chevrefeuille bleu, est une Caprifoliaceae des zones tempérées produisant des baies comestibles par l'Homme. Il s'agit d'une plante la plupart du temps auto-incompatible qui a besoin de pollinisateurs pour assurer sa reproduction sexuée. Dans les systèmes de culture, ses fleurs sont généralement visitées par_ Apis mellifera_, Bombus spp. (les bourdons), et d'autres variétés d'abeilles solitaires. Cependant, la plante à une floraison précoce au début du printemps et les fleurs peuvent supporter des températures allant jusqu'à -7°C. Les pollinisateurs actifs à cette période étant peu fréquents, on se demande si Bombus spp, dont une reine peut voler à des températures avoisinant les 0°C, est un meilleur pollinisateur que A. mellifera, qui préfère les climats chauds et ne coexiste pas à l'état naturel avec l'Haskap.
Une troisième espèce de pollinisateur est utilisée dans cette étude mais nous ne la traiterons pas dans cette analyse car elle y apporte peu d'informations.
Les analyses sont réalisées au printemps sur un verger d'Haskap de 30 ha, au Canada. Le verger est entouré de surfaces agricoles cultivant la canola, l'alfalfa et le blé. Dix espèces de Bombus (natives) sont observées et on apporte 12 ruches d'A. mellifera issues d'un apiculteur local.
La quantité de pollen déposée suite à une visite de pollinisateur (svd) est estimée en regardant la différence entre le nombre de grains de pollen déposés suite à une visite et le nombre de grains présents sur le style en l'absence de visite. Pour cela, on présente à côté d’une abeille qui vient tout juste de visiter une fleur, une branche avec plusieurs inflorescences non visitée. Ensuite on prend les stigmas des deux fleurs d'une même cyme et on les met sous lame et lamelles pour comptage. Ensuite, ont été estimés : la symétrie de la visite ( la formation de la baie n'étant possible que si les deux fleurs d'une même cyme sont pollinisées), le temps de visite ainsi que la densité de chaque pollinisateur.
Bombus sp. dépose plus de pollen et il visite plus vite les fleurs. Par contre, on n'observe pas de différence de comportement de visite des deux fleurs d'une même cyme avec A. mellifera. Entre 10h et 16h, A. mellifera est bien plus abondant que Bombus sp. Cependant, elles sont bien moins denses quand les températures sont plus faibles (chute en dessous de 13°C). Pour Bombus sp., les variations de température (entre 8°C et 30°C) observées durant l’étude n’impactent pas significativement son abondance. En revanche, celle-ci augmente légèrement au cours des différentes heures de la journée. Bombus sp. n’a besoin que de deux visites pour polliniser une fleur alors qu’A. mellifera bien plus. Les bourdons compensent leur faible densité par une visite des fleurs plus courte et une meilleure tolérance aux basses températures
Les svd sont difficiles à interpréter car lors de l'expérience les fleurs sont déplacées avec leur branche et manipulées. On intègre donc un biais qui augmente le nombre de grain de pollen venant des anthères de la fleur sur son propre style (autopollinisation).
De plus, ils valident leur hypothèse que Bombus sp. est meilleur en disant que les champs ont produit plein de fruits. L'Haskap étant auto-incompatible cela relèverait du service de pollinisation apporté par les pollinisateurs étudiés. Mais nous n'avons aucune données sur les fruits formés.
On voit qu'Apis mellifera reste tout de même un bon pollinisateur mais seulement dans des conditions optimales. Bien que ça soit un généraliste, il ne supporte pas les basses températures et il serait donc intéressant d'utiliser d'autres espèces dans les régions froides. Bombus sp. semble être un meilleur pollinisateur de l'Haskap en début de printemps, puis son rôle peut-être progressivement remplacé par celui d'Apis mellifera, qui en conditions favorables se révèlent être un compétiteur imbattable.
Les 3 auteurs ne sont pas spécialistes de la question et n'ont pas l'habitude de travailler avec les abeilles ( plus avec les poissons pour le chercheur le plus cité)