Les émissions des systèmes anti-corrosion des éoliennes en mer : évaluation de l'impact potentiel sur l'environnement marin
Afin de réduire ses émissions de gaz à effet de serre, l'Union Européenne prévoit de financer la construction d'éoliennes en mer afin que les énergies renouvelables représentent au moins 27% de l'énergie consommée d'ici 2030. Ces éoliennes sont bien plus rentables que leurs homologues continentales d'un point de vue énergétique. Cependant, Les fermes éoliennes sont susceptibles d'être à l'origine d'un rejet important de fluides potentiellement nocifs : du carburant car le trafic maritime y est plus important, une remobilisation de déchets sédimentés pendant l'enfouissement des câbles, la libération d'eau de refroidissement des turbines, etc. Peu d'études se sont intéressées à ces perturbations chimiques en lien avec les éoliennes.
La review s'intéresse plus en détail aux effets de la détérioration des structures de protection. En effet, la base métallique est continuellement exposée à l'eau de mer qui a un fort potentiel corrosif. L'action conjuguée des vagues et du vent et de certains organismes dégradent lentement l'éolienne. Celle-ci dispose de structures de protection face à ces contraintes : elles sont renforcées dans la zone de transition de l'éolienne où l'érosion est la plus forte en raison de l'action du sel cristallisé, soleil, organismes encroûtants, variations de pH, vagues et des collisions avec des objets flottants. (Figure) La zone submergée peut être épaissie ou protégée par un manteau en résine epoxy ou polyréthane, auquel peut s'ajouter un système de protection anodique. Le manteau et les anodes sont préférentiellement érodés, protégeant l'éolienne. Ces systèmes de protection sont élaborés selon des standards nationaux et internationaux qui prohibent l'utilisation de certaines substances en raisons de leur écotoxicité. D'autres sont autorisés s'ils sont introduits en mer déjà secs. Cependant, l'érosion et des opérations de maintenance des éoliennes peuvent libérer ces produits en mer. Les quantités libérées peuvent être très importantes puisque ces systèmes de protection représentent plusieurs tonnes de matériaux.
L'activité des anodes galvaniques acidifient l'eau et les sédiments environnants et les enrichissent en métaux, en particulier en aluminium, zinc et indium. Des éléments traces et des métaux lourds comme le plomb sont également libérés et présentent des risques. Cette review se penche sur l'effet des principaux métaux libérés par ce système de protection, classés par ordre d'abondance dans les anodes :
L'aluminium est connu présenter des propriétés toxiques pour certaines espèces d'algues et de poissons d'eau douce et marine à différents niveaux trophiques. On le retrouve en suspension et dans les sédiments. Il peut affecter des espèces filtreuses, planctoniques comme les diatomées ou fouisseuses. Son impact autour des éoliennes en mer est inconnu à ce jour.
Le zinc présente une toxicité dose dépendante. Les effets d'une accumulation locale autour des éoliennes n'est pas connu, mais il a été démontré qu'il pouvait perturber le système immunitaire de l'huître Crassostrea gigas.
L'indium est présent en quantité moindre, c'est pourquoi les études qui se sont penchées sur les effets de la libération des métaux des anodes en ont ignoré les effets. Cependant, il devient létal à certaines doses pour des poissons d'eau douce, mais aucune information n'est disponible concernant les doses trouvée à proximité des structures métalliques marines.
Le manteau se détériore également avec le temps, en libérant des composés organiques. L'effet combiné des produits qui le composent n'est pas toujours connu. Parmi les produits qu'il libère, on trouve le bisphénol A utilisé en grande quantité dans la production de plastique et résine epoxy. On en retrouve actuellement partout dans la nature mais ses effets sont discutés.
Les composés listés dans cette review sont majoritaires et présentent potentiellement le plus grand risque, mais ils sont loin d'être les seuls libérés.
La review s'appuie sur un grand nombre de publications, et elle est explique clairement la problématique existante. Elle s'attarde surtout sur les processus de détérioration des structures, mais les impacts sont le milieu marins sont pauvrement documentés. Les auteurs se justifient par le fait que peu d'études se sont réellement penchées dessus. Il ne semble pas y avoir de conflits d'intérêts.
Cette review est importante dans le cadre de cette controverse car elle s'intéresse à un aspect souvent peu considéré lors de l'étude de l'impact de l'implantation d'éoliennes en mer. Ces dernières se concentrent souvent sur le bruit ou la perturbation physique sur le milieu, mais peu d'informations circulent sur les effets des rejets de substances chimiques dans l'eau.
Elle apporte peu d'informations en terme d'effets observés sur l'ichtyofaune. C'est compréhensible puisqu'elle souligne que la documentation est faible. Elle oriente les études futures à se concentrer sur les substances à risque et à l'étude de leurs effets qui est à prendre en compte pour la construction de matériaux de protection minimisant l'écotoxicité dans un contexte où le nombre d'éoliennes en mer est croissant.
Il peut être intéressant de se demander si les structures de protection sont adaptées et suffisantes, et si elles ne devraient pas couvrir la totalité de la partie immergée de l'éolienne.