Titre du Livre :

Equilibres ponctués : une alternative au gradualisme phylétique dans Models in Paleobiology (1972)


Introduction au livre :

Ce texte est l'essai original critiquant la théorie du gradualisme phylétique, ce modèle de l'évolution supportant l'idée que la spéciation est un processus par modifications lentes et graduelles. En paléobiologie, le registre fossile est largement caractérisé par des "gaps" ("trous") et une forte discontinuité. Concrètement, bon nombre d'espèces dans ce registre sont morphologiquement stables sur des millions d'années alors que de nouvelles espèces y apparaissent spontanément sans y laisser d'"intermédiaires". Les auteurs proposent ainsi une vision alternative au gradualisme phylétique qui est celle des "équilibres ponctués". Ils donnent une interprétation à cette discontinuité observée en intégrant la dimension géographique où ces "gaps" seraient le résultat de la spéciation allopatrique plutôt qu'un registre fossile incomplet. Les évènements de diversification morphologique seraient la conséquence d'un évènement de spéciation suite à l'isolement géographique de petites populations.

Résumé et résultats du livre :

En paléobiologie, la présence de "gaps" ("trous") dans le registre fossile est indéniable traduisant le caractère discontinue de ce dernier. Ce constat est souvent imputé au fait que le registre fossile est largement incomplet, malgré que l'on puisse observer dans celui-ci de nombreuses espèces morphologiquement stables sur des millions d'années et que les formes transitionnelles soient totalement absentes.

Traditionnellement, la considération de la spéciation a été dominée par l'image du gradualisme phylétique, reflet des processus Darwinien. Pour les auteurs, le gradualisme phylétique est identifié comme tel :

  • l'apparition d'une nouvelle espèce résulte de la transformation d'une population ancestrale en ses descendants modifiés
  • la transformation est uniforme et lente
  • la transformation implique souvent la totalité de la population ancestrale
  • la transformation se produit au moins sur une large partie de l'aire de répartition de la population ancestrale.

Ces postulats ont ainsi deux lourdes implications :

  • le registre fossile pour l'origine d'une nouvelle espèce consiste en une longue séquence de formes intermédiaires, continues et graduelles liant les ancêtres et les descendants
  • les ruptures morphologiques dans une séquences phylétique sont dues à un registre fossile incomplet. Or, la théorie du gradualisme phylétique (et plus largement la théorie synthétique de l'évolution) est incohérente avec les observations fossiles et ne reflète pas la réalité paléobiologique.

C'est dans ce contexte que les auteurs proposent une vision alternative de la spéciation en prenant plus largement en compte a dimension géographique dans l'analyse des séries paléontologiques et en s'appuyant d'abord sur la théorie allopatrique de la spéciation pour une interprétation du registre fossile. Pour les auteurs, les principes de la spéciation allopatrique contrastent comme tel avec le gradualisme phylétique :

  • l'apparition de nouvelles espèces résulte de la scission de lignées
  • une nouvelle espèce se stabilise rapidement
  • un sous-ensemble d'une population ancestrale donne naissance à une nouvelle espèce
  • la nouvelle espèce apparait sur une zone isolée de l'aire de répartition de l'espèce ancestrale

Ces postulats ont ainsi deux lourdes implications :

  • le registre fossile pour l'origine de la descendance consistera en une rupture morphologique entre les deux formes, cette rupture marquant la migration de la descendance
  • les nombreuses ruptures dans le registre fossile sont réelles, reflétant la façon dont l'évolution opère et non un registre fossile incomplet.

De cette vision émerge l'idée des équilibres ponctués, une lignée restant longtemps stable morphologiquement (période de stase) et ponctuée par des évènements épisodiques et brefs de spéciation allopatrique , au cours desquels apparaissent de nouveaux types morphologiques.

Rigueur du livre :

Les limites de l'essai sont un corolaire à ce qu'il a vœux d'être. Les auteurs, en présentant les bases d'une nouvelle approche, d'une nouveau cadre conceptuel et d'une nouvelle théorie en devenir ne peuvent ainsi prétendre présenter un soubassement empirique et expérimental.

Publiée il y a environ 9 ans par Séb.
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