Le fer et le mélange affectent l’absorption du carbone biologique dans SOIREE et EisenEx, deux expériences de fertilisation par le fer dans l’océan austral
La fertilisation en fer des océans pour l'atténuation du réchauffement climatique est controversée. L'ordre de grandeur et la durée de stockage de carbone restent incertains et la vérification directe du stockage de carbone est en pratique impossible. Cette étude explore les changements dans l’eau de surface de la fugacité du CO2 notée fCO2 (la fugacité f est la pression qu'aurait un gaz réel s'il se comportait comme un gaz parfait) et de l’absorption du carbone inorganique dissous (DIC) biologique dans deux expériences de fertilisation par le fer de l’océan austral. Elle étudie aussi comment les conditions météorologiques et hydrographiques affectent l'absorption de carbone biologique après une fertilisation de l'océan par le fer.
Deux expériences de fertilisation des océans par le fer sont comparées. La Southern Ocean Iron Release Experiment (SOIREE) est menée dans le sud du front polaire antarctique dans un cadre hydrographique stable. L’expérience EisenEx est menée dans une zone au nord du front polaire antarctique. Elle est caractérisée par une succession rapide de vents calmes et de vents de tempêtes et des conditions hydrographiques dynamiques. L'hexafluorure de soufre SF6 est utilisé pour distinguer les eaux à l'intérieur et à l'extérieur de la parcelle enrichie en fer. La fCO2 de l'eau de surface et de l'air est mesurée. L'évolution de l'absorption du carbone dissous inorganique biologique et des échanges de CO2 air-océan sont comparées dans les deux expériences afin d'évaluer comment ils sont affectés par les régimes de mélange contrastés. Ils mesurent aussi la diffusion verticale et horizontale du carbone inorganique dissous.
Les ajouts de fer favorisent les blooms algaux dans les 2 études.
La fCO2 des eaux de surface diminue à un taux régulier dans SOIREE tandis que son évolution est en dents de scie dans EisenEx. Ces différences sont dues à des régimes de mélange contrastés (avec et sans tempête).
Les eaux enrichies en fer dans EisenEx absorbent quatre fois plus de CO2 atmosphérique en périodes de vents violents que dans SOIREE. L’absorption totale de carbone inorganique dans la parcelle est de 1389 tonnes de carbone dans SOIREE et 1433 tonnes dans EisenEx après 12 jours.
Les ajouts de fer font que les eaux fertilisées coulent avec le CO2 atmosphérique. Le réapprovisionnement en CO2 de l'océan vers l'atmosphère est faible par rapport à son absorption.
Les résultats impliquent que les régimes de mélange différents ont moins d’effet sur l’absorption de carbone biologique globale dans les eaux enrichies en fer que le suggère l’évolution de la fCO2 dans les eaux de surface.
Ils comparent leurs valeurs à celles calculées dans un autre article. Les valeurs des deux articles sont différentes car ils ne calculent pas la même chose. Bozec et al. calculent la réduction maximum du DIC tandis que dans cet article ils calculent la réduction moyenne. Ils ne font pas les mêmes hypothèses : les premiers supposent une absorption du DIC uniforme alors que les second prennent en compte une absorption hétérogène. Pour finir, ils ne calculent pas la réduction nette du DIC au même moment (après 20 jours pour Bozec et al. et après 18 jours dans cette étude). Donc finalement, on ne peut pas vérifier que la réduction nette du DIC qu'ils calculent est juste.
Ils ont mesuré directement l'absorption nette de DIC plutôt que d'utiliser des proxys comme la chlorophylle. Cela permet de diminuer l'incertitude sur les valeurs d'absorption.
Cette étude compare 2 expériences de fertilisation des océans. Elle montre que les régimes de mélange des eaux (tempêtes) ne modifient pas la quantité totale de carbone piégée par les océans après une fertilisation en fer.
La différence d'un facteur quatre entre les estimations de l'absorption de DIC nette (Bozec et al. et cet article) basées sur le même ensemble de données démontrent comme il est difficile de quantifier l'absorption de carbone biologique sur le court terme après une fertilisation par le fer. La difficulté dans la détermination de stockage de carbone après une fertilisation en fer et la faible efficacité de l'export de carbone sont des obstacles fondamentaux pour l'application de la méthode dans le but de stocker du carbone.