Un nouveau modèle de sélection de groupe pour l'évolution de l'homosexualité
Dans un premier temps, l'auteur replace le débat sur l'origine et le déterminisme de l'homosexualité, dans un contexte général, puis biologique. Il explique dans un premier temps que la biologie a cherché l'origine de l'homosexualité à partir de facteurs hormonaux, cérébraux et/ou génétique. En 2003, les études hormonales et basées sur les différentes zones du cerveaux n'avaient pas réussi à mettre en évidence des corrélations avec l'orientation sexuelle. Néanmoins, il y a des preuves d'une origine génétique, comme celle de Hamer et al. (1993) qui montrent qu'un gène impliqué dans l'orientation sexuelle se trouverait sur le bras long du chromosome X, dans la région q28.
Il redéfinit ensuite les grands théories évolutives du maintien de l'homosexualité, avec des bases génétiques ou non. Les théories sont les suivantes :
Super-dominance : Cette hypothèse dit que, si l'allèle "homosexuel" est récessif, les individus hétérozygotes auraient une valeur sélective supérieure à celles des homozygotes. Ainsi, un individu hétérosexuel hétérozygote se reproduirait plus que les hétérosexuels homozygotes, et les homosexuels, ce qui permettrait le maintien de l'allèle de l'homosexualité dans une population. Un scénario proposé par McKnight (1997) serait que les femmes préféreraient les hétérosexuels hétérozygotes, car ils seraient de meilleurs partenaires que les deux types d'homozygotes. Aucune étude n'a validé ce scénario en 2003.
Femmes fertiles (SAGH) : Cette théorie fait l'hypothèse que le gène se trouve sur le chromosome X, et que chez les hommes et chez les femmes, il détermine une attirance préférentielle pour les hommes . La théorie dit que les femmes portants ce gène auraient plus de descendants que les femmes qui ne le portent pas, ce qui compenserait le déficit de descendants dû aux frères homosexuels. Il existe de nombreuses observations de mécanismes créant un différentiel de reproduction entre sexes chez d'autres organismes. En 2003 il n'y avait pas de support empirique pour ce mécanisme, mais des études récentes montrent que c'est une hypothèse crédible.
Hypervariabilité : Cette théorie dit que certaines séquences d'ADN auraient des taux de mutation plus élevés que la moyenne. Ainsi, le gène "homosexuel" pourrait être maintenu dans le génome s'il a un taux de mutation élevé, même s'il ne confère pas d'avantage particulier. Des études ont montré que le chromosome Y aurait un taux de mutation plus élevé que le chromosomes X, ce qui en ferait un bon candidat pour contenir un gène "homosexuel" hypervariable.
Sélection de parentèle : Cette théorie, introduite par Wilson en 1975 dit que les individus homosexuels, bien qu'ayant une valeur sélective inférieure à la moyenne, permettent à leurs apparentés d'augmenter leurs valeurs sélectives grâce à un comportement altruiste. Cette théorie se base sur les travaux d'Hamilton qui dit que la sélection de parentèle est un processus durable si le coût à moins se reproduire est inférieur au produit entre le lien de parenté et le gain reproductif des apparentés. Cette théorie est encore très débattue, des résultats contradictoires ayant été trouvés.
Manipulation parentale :Cette théorie dit que les parents pourraient manipuler l'orientation sexuelle de certains de leurs enfants si cela leur permet d'augmenter le nombre de descendants à long terme (petits enfants). Cette théorie est assez débattue, car il est difficile d'imaginer un scénario plausible pour ce type de comportement.
Enfin, l'auteur propose un nouveau modèle de sélection de groupe, qui dit que dans une population contenant des individus hétérosexuels et des homosexuels (qui font moins de descendants que les hétérosexuels), si la population totale se retrouve divisée en deux groupes, contenant soit plus d'hétérosexuels, soit plus d'homosexuels, alors en moyenne dans l'ensemble des deux groupes, les homosexuels ont une valeur sélective supérieure aux hétérosexuels (d'après le paradoxe de Simpson) (voir Figure 1).
La revue est plutôt complète, et donc assez robuste dans le sens ou elle reprend les différentes grandes théories du maintien de l'homosexualité dans la nature, avec un avis critique appuyé, lorsque c'est possible, par des exemples empiriques.
En revanche, le nouveau modèle apporté par l'auteur est plus critiquable, car il possède un nombre d'hypothèses important (7!), qui sont peu flexibles, et les explications fournies pour imager le modèle sont assez discutables (l'auteur parle d'une meilleure capacité des individus homosexuels à trouver des lieux propices à la vie). De plus, l'origine de la formation de groupes de même orientation sexuelle est expliquée, par exemple par des oppressions envers une certaine orientation sexuelle, mais on ne trouve pas ou plus de populations uniquement homosexuelles ou hétérosexuelles dans les pays où l'homosexualité est acceptée (ce qui est majoritairement le cas).
Cette review est une bonne base pour comprendre les principales théories sur l'évolution et le maintien de l'homosexualité au cours du temps. Elle présente clairement les différentes hypothèses, avec les principaux contributeurs, et apporte, quand cela est possible, des confirmations ou contradictions empiriques à la théorie. Elle présente également un nouveau modèle de sélection de groupe, qui reste purement théorique, et qui n'a aucun appui empirique.
Cet article aurait pu être classé dans une autre catégorie que "review", car le papier a initialement été écrit pour présenter une nouvelle théorie. Néanmoins, et comme discuté dans les parties précédentes, le nouveau modèle proposé reste assez "flou", dans le sens ou il est présenté simplement, mais aucune simulation ou apport empirique ne lui donne de "poids". Je pense donc que cet article doit être vu comme une revue de l'état l'art des différentes théories sur le maintien de l'homosexualité.