La fertilisation des océans par le fer est-elle efficace pour réduire l'effet de serre ?
Les conséquences des changements climatiques sont profondes, et la communauté scientifique a l'obligation d'évaluer les effets secondaires des options stratégiques pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre et renforcer les puits de CO2 dans les réservoirs autres que l'atmosphère. La fertilisation des océans par le fer (OIF), une des multiples méthodes proposées pour atténuer l'augmentation du CO2 atmosphérique, consiste à stimuler la croissance du phytoplancton net en libérant du fer dans certaines parties de l'océan de surface. La communauté océanographique internationale a étudié l'OIF, dans une vingtaine de programmes de terrain avec petite échelle, les ajouts ciblés de fer depuis 1993. Les programmes de fertilisation ont été effectués à petite échelle afin de mieux comprendre le fonctionnement de l'écosystème marin et son interaction avec le climat. Elles permettent dans un second temps de déterminer si oui ou non la fertilisation des océans par le fer peut réduire le CO2 atmosphérique. Néanmoins l'efficacité de séquestration du CO2 atmosphérique par l'OIF en mer profonde reste faiblement contrainte, et nous ne comprenons pas les impacts biogéochimiques et écologiques sur le long terme. Les perturbations de l'environnement de l'OIF ne sont pas locales et sont réparties sur une grande surface par la circulation océanique, ce qui rend la vérification et l'évaluation à long terme très difficile.
Des études de modélisation ont abordé la séquestration plus directement et ont suggéré que l'OIF dans les domaines de nutriments élevés continuels (soi-disant domaines riches en nutriments, faible en chlorophylle, HNLC) ne seraient pas susceptibles de séquestrer plus de plusieurs centaines de millions de tonnes de carbone par an. Ainsi, l'OIF ne pourrait apporter qu'une contribution partielle à l'atténuation des augmentations mondiales de CO2. Comme pour toute manipulation humaine de l'environnement, de l'OIF comporte des risques, ainsi que des avantages potentiels. Nous sommes actuellement confrontés à des décisions sur la réglementation climatique, telles que le cadre post-Kyoto discuté à Bali, d'échange au sein du Congrès des États-Unis, et l'examen de l'OIF par les parties à la Convention de Londres, également la COP21, seule la recherche sur la biogéochimie des océans permettra de guider ces décisions politiques importantes.