Peut-on considérer la Terre comme un organisme vivant ? L'hypothèse Gaia.
Devant la complexité du changement climatique, il devient nécessaire de penser le système-Terre à travers différentes composantes : atmosphère, hydrosphère, lithosphère et biosphère. Des disciplines jeunes comme la climatologie, l'écologie globale ou la « Earth System Science » permettent d'étudier cette complexité. L'enjeu étant de pouvoir anticiper le changement climatique, de s'y adapter et si possible de l'atténuer.
Selon l’hypothèse Gaia, formulée par James Lovelock (1970) et reprise par certains scientifiques comme Lynn Margulis (théorie endosymbiotique), la Terre peut être vue comme « un système physiologique dynamique qui inclut la biosphère et maintient notre planète depuis plus de trois milliards d'années en harmonie avec la vie ». En effet, il a été montré que des organismes vivants étaient impliqués dans la régulation du climat (e.g. phytoplancton via les DMS, hypothèse CLAW) et donc dans son maintient dans un état relativement stable. Aujourd’hui, l’existence de mécanismes globaux où la biosphère joue un rôle dans la régulation du climat n’est pas remise en cause.
Néanmoins l’idée que la vie - comme ensemble des êtres vivants - tende à maintenir au cours du temps les conditions qui lui sont favorables en modifiant son environnement et par des processus d’autorégulation à l’échelle globale demeure controversée. Pour J. Lovelock, les mécanismes de régulation de Gaia sont issus d'une éco-évolution impliquant simultanément l'évolution du milieu géophysique et l'évolution des organismes vivants.
L’hypothèse Gaia est principalement critiquée pour son cadre épistémologique mal défini (J. Kirchner) et à cause du fait que la sélection naturelle ne permette pas de conclure à l’existence d’une forme d’altruisme des espèces à l’échelle globale favorisant leurs conditions d’existence (R. Dawkins, W. Ford Doolittle, S.J. Gould).
Enfin, J. Lovelock est accusé de faire reposer sa théorie sur une base non-scientifique (concept religieux de la « Terre-Mère » d’une part et de « finalité » dans le vivant d’autre part).
Si l'on admet l'hypothèse Gaia (la Terre comme organisme vivant) , d'une part celle-ci remet fortement en cause la légitimité de l'exploitation de la planète par l'homme sur le plan éthique, et d'autre part sur le plan scientifique, l'introduction de processus « gaiens » pourrait opérer un changement de paradigme dans les sciences de l'écologie et de l'évolution et ouvrir de nouveaux champs d'application (e.g. Géo-ingénirie pour « guérir » la Terre).