Titre de l'article

Perspective de la théorie de la stratégie de recherche de nourriture sur la critique associative de la surchasse du Pléistocène en Amérique du Nord

Introduction à l'article

Le faible nombre de sites archéologiques fournissant des preuves irréfutables de l'implication humaine dans l'extinction de la mégafaune constitue le principal argument de critique associative de la théorie de la surchasse. En Amérique du Nord, cette absence de preuve pourrait résulter de la rapidité à laquelle l'Homme s'est déplacé à travers le continent, entraînant alors des extinctions si rapides que peu de sites de mise à mort auraient été conservés. Cet argument, également appelé la réfutation taphonomique, est notamment contesté par le fait que la mégafaune qui s'est éteinte au cours du Pléistocène tardif est absente du registre archéologique tandis qu'elle est bien représentée dans le registre paléontologique. Ainsi, pour départager ces différents arguments qui défendent ou s'opposent à la théorie de la surchasse, les auteur proposent une nouvelle méthodologie en s'appuyant sur la stratégie de recherche de nourriture de l'Homme.

Expériences de l'article

Cette étude propose une comparaison des registres archéologiques (RA) et paléontologiques (RP) de 5 taxons de la mégafaune éteints ainsi que de 8 taxons toujours existants, ayant tous été documentés sur des sites archéologiques et enregistrés entre 15 et 10 ka BP aux États-Unis contigus. Pour ce faire, les auteurs ont collecté des données paléontologiques et archéologiques issues de Neotoma Paleoecology Database et des études de Grayson & Metzer (2015) et de Cannon & Metlzer's (2004). Un modèle linéaire généralisé a ensuite été construit avec les données afin de décrire la relation entre les occurrences paléontologiques (OP) et archéologiques (OA) des différents taxons. Cette relation linéaire a également servi à prédire l'occurrence dans le RA des 32 autres taxons de la mégafaune nord-américaine qui se sont éteints à la fin Pléistocène, mais n'ont pas ou peu été enregistrés dans des sites archéologiques.

Résultats de l'article

Les résultats obtenus montrent que :

  1. Le nombre de OA observé pour un taxon donné est positivement corrélé à l'abondance des individus vivants (OP). Cette relation suggère que l'abondance d'un taxon donné dans le RP est un prédicteur fiable de son abondance dans le RA. Néanmoins, certains points aberrants sont observés, notamment pour les mammouths, ce qui semble indiquer qu'un plus grand nombre d'individus a été chassé au regard de leur abondance dans le RP.
  2. Il n'y a aucune différence entre l'abondance des taxons éteints et toujours existants dans le RA et le RP, ce qui ne soutient pas la critique associative qui stipule que la mégafaune éteinte est moins abondante dans le RA que dans le RP.
  3. Pour les 32 autres taxons éteints, le nombre de OA prédit avec le modèle est faible pour 28 d'entre eux. Cela signifie que ces taxons étaient probablement déjà éteints ou peu abondants avant l'arrivée des Hommes et qu'ils n'étaient peu ou pas chassés par eux.
Rigueur de l'article

Les auteurs ont intégré dans l'étude un site archéologique localisé au Nord du Mexique alors que les enregistrements paléontologiques proviennent tous des États-Unis contigus, cela pourrait potentiellement produire un biais dans l'interprétation des résultats.
Le modèle proie utilisé dans cette étude repose sur des hypothèses strictes pouvant provoquer des différences entre les prévisions du modèle et les tendances observées. L'une des hypothèses stipule que les proies sont recherchées simultanément dans des parcelles où les ressources sont homogènes. La présente analyse intègre de nombreux environnements hétérogènes puisqu'elle est réalisée à l'échelle d'un large territoire, et il est supposé que les chasseurs humains n'ont pas alloué les mêmes efforts de prédation dans les différentes parcelles de ressources. Il est donc possible que le taux de rencontre des Hommes et des différents taxons ne soit pas nécessairement corrélé à l'abondance des taxons dans le registre paléontologique.

Ce que cet article apporte au débat

Bien que les résultats de l'article ne permettent pas de soutenir la théorie de la surchasse, ils apportent des arguments en faveur de la réfutation taphonomique : l'absence de preuves archéologiques directes ne peut être considérée comme une preuve irréfutable que les humains n'ont pas chassé la mégafaune à grande échelle. Il est donc probable que le faible nombre de sites archéologiques connus actuellement résulte de la courte période à laquelle les humains ont coexisté avec la mégafaune.
De plus, il serait intéressant à l'avenir d'appliquer cette méthodologie à de plus petites échelles spatio-temporelles, au sein d'environnements homogènes, où les enregistrements archéologiques et paléontologiques sont abondants afin que l'analyse gagne en robustesse et permette d'accepter ou non la réfutation taphonomique. Finalement l'article montre que les modèles basés sur la stratégie de recherche de nourriture constituent un cadre utile pour comprendre les impacts humains sur la mégafaune.

Publiée il y a plus de 3 ans par m.brondani et J. Degen.
Dernière modification il y a plus de 3 ans.
Article : A foraging theory perspective on the associational critique of North American Pleistocene overkill
  • 1 1 1
  • Auteurs
    Allison L. Wolfe, Jack M. Broughton
  • Année de publication
    2020
  • Journal
    Journal of Archaeological Science
  • Abstract (dans sa langue originale)

    At least 37 genera of mostly large mammals went extinct toward the end of the Pleistocene in North America near the time of human arrival, and this general synchrony has long been argued to suggest human hunting (i.e.,“overkill”) caused those losses. However, there exist only a few sites that securely document the human utilization of extinct megafauna, and this apparent scarcity - often referred to as the Associational Critique - remains the single most widely-cited, empirically-based objection to overkill. Some explain this scarcity as a function of taphonomic issues and sampling, suggesting few kill sites exist because the period of overlap between people and megafauna was so short. For some time, this argument we call the ‘Taphonomic Rebuttal’ has been challenged by observations that many extinct megafauna have rich late Pleistocene fossil records but are nonetheless poorly represented in archaeological contexts. Such analyses also suggest that surviving (extant) megafauna (e.g., deer [Odocoileus], bison [Bison], moose [Alces]) are overrepresented in archaeological faunas of the period relative to those that would ultimately go extinct. We build on these observations using a foraging theory framework that dictates such comparisons between paleontological and archaeological abundance records must be conducted with samples derived from similar chronological and geographical windows. Approached this way, we find that the number of secure archaeological associations known for any given megafauna taxon scales positively with their paleontological abundance. There is thus no systematic difference in the abundances of extant and extinct taxa in archaeological versus paleontological contexts as previous analyses have suggested, and thus no support for the Associational Critique from these data.

  • Identifiant unique
    10.1016/j.jas.2020.105162
  • Accéder à la référence
  • Apparait dans la controverse
    L’Homme est-il responsable des extinctions de la mégafaune au Pléistocène ?
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