Titre de la review

Review des enjeux chronologiques et environnementaux de l'extinction du mammouth laineux (Mammuthus primigenius) et du rhinocéros laineux (Coelodonta antiquitatis) en Eurasie

Résumé de la review

Cette review s'intéresse à l'extinction du mammouth et du rhinocéros laineux, deux espèces typiques du Pléistocène dont les restes archéologiques ont permis d'établir les schémas de distribution spatiotemporelle. Les mammouths occupaient toute l'Europe ainsi que l'actuelle Russie. Les rhinocéros laineux également, excepté la Fennoscandie et certaines zones d'Arctique. Cette review met en perspective les dates obtenues par 14C non calibré sur les restes archéologiques avec le climat et l'environnement correspondants.
Les mammouths se seraient éteints en Europe en 12 000 BP, à l'Est de la Sibérie en 8 700 BP et sur l'île de Wrangel en 3 700 BP. Un modèle de "retraite au Nord" a été développé par Sher en 1997. Cependant, la découverte de squelettes d'après 12 000 BP hors Sibérie suggère l'existence de refuges en régions plus tempérées, ce qui remet en cause ce modèle. De plus, les mammouths réfugiés sur la péninsule Taymyr en Sibérie pourraient ensuite être retournés en Europe vers 10 500-9 800 BP. Plus récemment, des mammouths datant de l'Holocène ont été découverts sur la péninsule Kyttyk (9 000 à 8 700 BP) et l'île Saint-Paul (7 980-5 700 BP).
En Europe centrale et de l'Ouest, la végétation sous le climat doux du Bølling-Allerød (14 690 BP à 12 890 BP) était composée de steppe, toundra, pins et bouleaux. Au Nord-Est de l'Europe, c'était une toundra avec des arbustes puis au Dryas récent (12 800 à 11 700 BP) une forêt-toundra et à l'orée de l'Holocène une forêt de conifères avec de zones résiduelles de toundra. A l'Ouest de la Sibérie, la steppe, les bouleaux et les mélèzes laissent place à un milieu ouvert avec quelques arbustes lors du Dryas récent. Au Nord-Est, où les mammouths ont survécu jusqu'à 8 700 BP, la toundra et les bouleaux dominaient encore au début de l'Holocène. La tendance générale est au remplacement de la steppe-toundra par des forêts et des tourbières lors de la transition Pléistocène-Holocène. Cependant, dans certaines zones au Nord et lors du Dryas récent, la transition est plus lente et les milieux ouverts persistent. L'île de Wrangel était recouverte de prairies, bouleaux et saules nains durant l'Holocène mais ceux-ci ont fini par disparaître autour de 3000 BP, coïncidant avec l'extinction des mammouths de la sous-espèce vrangeliensis en 3700 BP. Des analyses de contenu stomacal réalisées sur des mammouths de différents sites révèlent que leur régime alimentaire était composé majoritairement d'herbacées et d'arbustes. Il est donc probable que le réchauffement du Bølling-Allerød ait entrainé la disparition progressive des prairies et arbustes et par conséquent celle des mammouths. Cela explique que les mammouths les plus récents se situent en Sibérie ou dans des zones-refuges de toundra résiduelle en dehors de l'Arctique.
Selon l'auteur, l'extinction a eu lieu sur un temps trop court (4700 ans) pour que les Hommes ait pu tuer des mammouths partout, en particulier en Arctique, région peu peuplée par l'Homme. De plus, Hommes et mammouths ont co-existé pendant des millénaires avant l'extinction de ces derniers. L'auteur critique le modèle de "blitzkrieg" de Nogués-Bravo et al. 2008 qui n'a selon lui pas de valeur. Si l'Homme a eu un effet, il est probablement mineur. Des recherches plus approfondies sont nécessaires, en particulier sur d'éventuelles différences entre les pressions cynégétiques en Europe et en Sibérie.
L'extinction du rhinocéros laineux est moins bien documentée et certaines datations sont douteuses. Il semble qu'il se soit éteint en 13 600 BP en Europe lors du Dryas ancien et entre 14 400 et 12 280 dans l'Oural lors du Bølling-Allerød. Le spécimen le plus récent a été retrouvé à l'Ouest de la Sibérie et date de 10 770 BP, ce qui correspond au Dryas récent. L'Oural et l'Ouest de la Sibérie sont donc les derniers refuges du rhinocéros laineux dont l'extinction paraît liée à une réduction d'habitat.
La disparition de leur habitat, a priori sans effet anthropique, semble avoir causé l'extinction de ces espèces.

Rigueur de la review

Aucun conflit d'intérêt déclaré. L'auteur évoque les datations au 14C douteuses ou controversées de la littérature, il les compare à d'autres datations des mêmes sites et justifie son choix lorsqu'il les accepte ou les rejette. De même, lorsqu'il critique le modèle de "blitzkrieg" de Nogués-Bravo et al. 2008 c'est de manière argumentée et en s'appuyant sur la littérature.

Ce que cette review apporte au débat

Cette review met en évidence que la réalité est plus complexe que la théorie "de retraite au Nord" de Sher concernant les mammouths. En effet, la transition des toundras vers les forêts lors du Bølling-Allerød a été progressive et inégale donc des mammouths ont pu se réfugier dans les zones résiduelles de toundra en dehors de l'Arctique. Les données rassemblées confirment que la cause principale de la disparition de cette espèce est bien la disparition des herbes et arbustes dont elle se nourrissait. L'auteur critique le modèle de "blitzkrieg" de Nogués-Bravo et al. 2008 (extermination des mammouths par l'Homme) qui serait fondé sur des erreurs factuelles et de mauvaises interprétations. Enfin, concernant l'extinction des rhinocéros laineux, il semblerait qu'elle soit due à la disparition de leur habitat mais les données sont très limitées pour cette espèce.

Remarques sur la review

Le paragraphe concernant les rhinocéros laineux est très peu développé (par exemple pas d'hypothèse sur son régime alimentaire et aucune évocation d'un potentiel effet anthropique), peut-être par manque de données.

Publiée il y a plus de 3 ans par J. Degen.
Dernière modification il y a plus de 3 ans.
Review : Extinction of the woolly mammoth (Mammuthus primigenius) and woolly rhinoceros (Coelodonta antiquitatis) in Eurasia: Review of chronological and environmental issues
  • Auteurs
    YAROSLAV V. KUZMIN
  • Année de publication
    2009
  • Journal
    Boreas
  • Abstract (dans sa langue originale)

    The current evidence for date and environmental preferences of the extinction of two middle–late Pleistocene
    megafaunal species, the woolly mammoth (Mammuthus primigenius Blum.) and woolly rhinoceros (Coelodonta
    antiquitatis Blum.), is presented in this review. It is suggested that extinction of these large herbivores in Eurasia
    was closely related to landscape changes near the Pleistocene–Holocene boundary (c. 12 000–9000 uncalibrated
    radiocarbon years ago, yr BP), mainly involving the widespread forest formations in the temperate and arctic
    regions of northern Eurasia and the loss of grasslands crucial to the existence of woolly mammoth and rhinoceros.
    However, some woolly mammoth populations survived well into the Holocene (up to c. 3700 yr BP), showing that
    the process of final extinction was fairly complex, with delays in some regions of up to several millennia. The
    possible role of Palaeolithic humans in the extinction of Late Pleistocene megafauna is also considered.

  • Identifiant unique
    10.1111/j.1502-3885.2009.00122.x
  • Accès libre
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  • Apparait dans la controverse
    L’Homme est-il responsable des extinctions de la mégafaune au Pléistocène ?
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