Les Hommes plutôt que le climat comme cause primaire de l'extinction de la mégafaune australienne au Pléistocène
Les causes de l'extinction de la mégafaune généralement proposées sont les variations climatiques, la chasse, la dégradation de l'habitat par l'Homme ou une synergie Homme-climat. L'Australie a vu 85% de ses espèces de mégamammifères s'éteindre autour de 50 000 ans BP. La fiabilité des données paléontologiques est variable et les dates obtenues s'approchent ou dépassent les limites de la datation au 14C, ce qui rend particulièrement difficile l'évaluation des hypothèses proposées.
Cet article se concentre sur le Sud-Ouest de l'Australie, où ont été retrouvées les traces les plus anciennes d'activité humaine. La région est également un bon candidat comme refuge pour la mégafaune car elle abrite des forêts denses. En utilisant les spores de Sporormiella contenues dans les sédiments marins comme proxy de la biomasse d'herbivores sur 150 000 ans, les auteurs espèrent apporter un éclairage nouveau à l'extinction de la mégafaune australienne.
L'échantillon sédimentaire MD03-2614G est prélevé à 100 km des côtes au Sud du Cap Pasley à 1070 m de profondeur. Une datation au 14C calibré et le suivi du ẟ18O sont réalisés sur les foraminifères qu'il contient puis les dates obtenues sont comparées avec d'autres banques de données.
D'autre part, la fraction terrigène mesurée (< 63 micromètres) correspondant à l'érosion des terres émergées et aux poussières apportées par le vent permet d'évaluer l'aridité. Trente-neuf échantillons sont préparés puis observés au microscope : les fragments de charbon de plus de 10 micromètres sont comptés, ainsi que les spores de Sporormiella et les grains de pollen après identification. Les champignons coprophages Sporormiella poussent dans le fumier d'herbivores et ont déjà été utilisés comme proxy de leur biomasse dans d'autres régions. La fraction du nombre total de grains de pollen est calculée pour les genres Sporormiella, Eucalyptus, Callitris et les herbacées ligneuses.
Entre 130 000 et 70 000 BP, sous un climat chaud avec de fortes précipitations, le couvert forestier et notamment le genre Eucalyptus s'étend. Les pics de charbon enregistrés sont associés à un régime de feu de type forêt sclérophylle.
La diminution de la fraction terrigène de 70 000 à 15 000 BP indique que le climat devient plus aride. Une transition majeure a lieu autour de 70 000 BP : les arbres laissent place à des herbacées ligneuses et la diminution du charbon montre que la biomasse végétale qui brûle est plus faible.
Jusqu'à 45 000 BP, le haut pourcentage de Sporormiella indique une biomasse d'herbivores importante, insensible à la transition de 70 000 BP. Cette valeur diminue fortement de 9,7% à 2% en 43 100 BP. Cette diminution est interprétée comme marqueur de l'extinction de la mégafaune. L'extinction débute donc 2000 ans après la colonisation de l'Australie par les Hommes et 13000 ans avant la période glaciaire suivante, ce qui est en faveur d'une cause anthropique.
Absence de conflit d'intérêt déclaré par les auteurs.
Les spores de Sporormiella sont un proxy de la biomasse herbivore donc l'article ne peut conclure que sur les mégaherbivores, pas la mégafaune entière : il faudrait que ce soit davantage précisé, à commencer par le titre.
Dans la description de la méthode, il n'est pas précisé si les comptages des morceaux de charbon et l'identification des grains de pollen ont été réalisés plusieurs fois par différentes personnes ou non.
L'utilisation d'une séquence sédimentaire marine est une approche originale qui permet de se libérer de biais taphonomiques.
L'article montre, via le pourcentage de Sporormiella qui représente la biomasse d'herbivores, que la mégafaune a survécu à un climat aride et à la transition végétale de 70 000 BP avant de s'éteindre entre 45 000 et 43 100 BP. Ces observations signifient que l'hypothèse climatique est peu probable.
D'autre part, le début de l'extinction a lieu 2000 ans après la colonisation de l'Australie par l'Homme, ce qui suggère plutôt une cause anthropique à l'extinction de la mégafaune australienne.
Les auteurs ne précisent pas si les champignons Sporormiella poussent en même quantité dans le fumier de toutes les espèces de mégafaune. Si ce n'est pas le cas, cela risque de n'être un proxy que de certaines espèces.
De plus, l'article est en faveur d'une cause anthropique mais la seule preuve d'interaction Homme-mégafaune citée pour la période considérée provient du centre de l'Australie et non du Sud-Ouest. Peut-être que c'est par manque de données dans la région mais il serait souhaitable que cette information soit explicitée.
Environmental histories that span the last full glacial cycle and are representative of regional
change in Australia are scarce, hampering assessment of environmental change preceding
and concurrent with human dispersal on the continent ca. 47,000 years ago. Here we present
a continuous 150,000-year record offshore south-western Australia and identify the timing of
two critical late Pleistocene events: wide-scale ecosystem change and regional megafaunal
population collapse. We establish that substantial changes in vegetation and fire regime
occurred B70,000 years ago under a climate much drier than today. We record high levels
of the dung fungus Sporormiella, a proxy for herbivore biomass, from 150,000 to 45,000
years ago, then a marked decline indicating megafaunal population collapse, from 45,000 to
43,100 years ago, placing the extinctions within 4,000 years of human dispersal across
Australia. These findings rule out climate change, and implicate humans, as the primary
extinction cause.