Un déficit locomoteur induit par des doses sublétales d'insecticides pyréthrinoïdes et néonicotinoïdes chez l'abeille domestique Apis mellifera
Au cours des dernières décennies, une augmentation de la mortalité des colonies d'abeilles a été signalée dans le monde entier et a attiré l'attention d'une large communauté scientifique sur les conséquences potentielles d'une mauvaise utilisation des pesticides sur la survie des pollinisateurs. Les effets des doses sublétales d'insecticides sur le système neuromusculaire des abeilles ne sont pas faciles à analyser. Des méthodes d'évaluation de la capacité des abeilles à retourner à la ruche après exposition à une dose sublétale d'insecticide (le «test de vol de retour») ont donc été développées. Ce sont des tests de locomotion dans des conditions de laboratoire faciles à mettre en place ,reproductibles permettant l'évaluation évaluer l'effet de doses sublétales d'insecticides. Le but de cette étude était donc de comparer les effets délétères de doses sublétales de plusieurs pesticides sur la locomotion des abeilles _Apis mellifera_dans leur premier jour de vie adulte.
Dans cette analyse nous nous focaliserons uniquement sur les effets du néonicotinoïde à savoir le thiamétoxame.Des abeilles nouvellement émergées ( Apis mellifera ) ont été obtenues au printemps à partir de deux ruches (avec reines sœurs) maintenues dans un rucher expérimental.Les expériences sur le thiaméthoxame ont été réalisées sur la colonie 1 (été 2013). Les abeilles ont été exposées aux divers produits chimiques. Les auteurs ont dans un premier temps déterminé la SLD 48h (définie comme la dose produisant un niveau de mortalité non statistiquement différent du témoin 48 heures après l'exposition) du thiamétoxame qui est de 3,8 ng / abeille. Suite à quoi ils ont exposé les abeilles à cette dose pendant plus de 200 minutes avec des répétitions sur 30 abeilles. Les auteurs ont ensuite surveillé l'activité locomotrice des abeilles pendant 3 minutes à l'aide d'une webcam contrôlée avec le logiciel VirtualDub et des test statistiques ont permis de déterminer la significativité de ces résultats.
La fonction locomotrice et les déficits generés suite à une exposition à un insecticide ont été évalués par vidéo-tracking des abeilles placées dans une arène verticale fermée. Les abeilles individuelles soumises à ce test ont affiché des trajectoires variables : en effet, pendant 3 minutes, chaque abeille n'a exploré qu'une fraction de l'arène. Cependant, dans l'ensemble, les abeilles ont visité toutes les parties de l'arène, bien que les côtés aient été visités plus souvent.
La distance totale parcourue a été choisie comme une approximation de la capacité locomotrice de l'abeille.Les 5 groupes de contrôle ont presenté des propriétés de locomotion statistiquement identiques tandis que la distance parcourue par les individus traités au thiamétoxame était significativement plus faible par rapport au témoin.
Cet article montre que ce test pourrait être utilisé comme une analyse préliminaire avant de mettre en œuvre des expériences de vol de retour plus sophistiquées ou des tests de mémoire ou d'orientation plus subtils. Cependant il est important de noter qu'un tel test de locomotion en laboratoire est formalisé, standardisé et donc ne prends pas en compte la sensibilité des abeilles aux variations saisonnières, phénologiques, météorologiques et paysagères. Bien que la totalité des résultats ne permet pas de conclure quant au réel impact du thiamétoxame sur la locomotion des abeilles puisque d'autres éléments sont également à prendre en compte (DL50 par exemple afin de faire le lien avec la mortalité des abeilles suit à ces expositions) , cet article nous permet quand même de visualiser l'impact d'une exposition des abeilles au néonicotinoïde sur l'orientation et la locomotion des abeilles. Ce test doit donc être mené dans les conditions réelles du terrain.