Titre de l'article

Test de l'hypothèse de surchasse de Martin en utilisant la datation par le radiocarbone sur la mégafaune éteinte

Introduction à l'article

En 1973, Martin formule sa théorie de la surchasse selon laquelle les Hommes arrivés en Amérique par la Béringie autour de 13 500 BP ont déferlé via le corridor libre de glace en Amérique du Nord puis jusqu'en Amérique du Sud, provoquant l'extinction de la mégafaune par la chasse. Il stipule qu'un effectif réduit d'Hommes aurait pu avoir un impact écologique marqué et que les populations humaines devaient croître rapidement car bien nourries. L'extinction aurait eu lieu en 1000 ans environ, mais l'auteur n'ayant pas accès à l'époque à la calibration du 14C, certaines dates proposées sont imprécises.
Les auteurs s'appuient sur des banques de données de datations 14C pour retracer la chronologie du déclin de la mégafaune à l'Est de la Béringie, aux Etats-Unis et en Amérique du Sud. Ils souhaitent tester si cette chronologie est cohérente avec celle proposée par Martin pour la surchasse. Pour cela, ils utilisent uniquement les données concernant la mégafaune, en excluant les Hommes.

Expériences de l'article
  • Les auteurs s'appuient sur l'hypothèse que l'intervalle entre deux datations est inversement proportionnel à l'effectif de la population. Les dates de déclin pour chaque espèce correspondent donc au moment où les intervalles ont commencé à s'allonger. Ceci permet la construction d'un modèle linéaire généralisé avec des points de rupture estimés reconstituant la chronologie des déclins de la mégafaune.

  • Les datations sont corrigées pour le biais taphonomique afin de prendre en compte les pertes sédimentaires au cours du temps. Les auteurs font ensuite l'hypothèse que la distribution des fréquences des datations 14C calibrées reflète la densité de population. Pour chaque région, un histogramme des fréquences relatives (nombre de datations à un temps donné sur le nombre total) en fonction du temps est élaboré . Celui-ci n'est valable que si les datations disponibles sont représentatives des fréquences réelles et que la correction taphonomique nécessaire est identique pour chaque région.

Résultats de l'article

Les deux méthodes utilisées donnent des résultats similaires et confirment que le déclin de la mégafaune s'est propagé du Nord vers le Sud.
Le déclin en Béringie a eu lieu en 14 661 BP donc avant l'estimation de Martin, avec un intervalle de confiance large (19 958 à 13 613 BP). L'Homme et l'Allerød sont proposés comme causes initiales.
Pour les Etats-Unis (13 001 BP) et l'Amérique du Sud (12 967 BP) les dates de déclin estimées correspondent à celles proposées par Martin. Les incertitudes induisent une superposition des déclins dans ces régions.
En Béringie, la colonisation a débuté plus tôt que la date estimée par Martin et la coexistence avec la mégafaune a duré 600 ans. Cette coexistence est de 6000 ans pour les Etats-Unis et l'Amérique du Sud à cause d'un étalement des déclins.
L'analyse des datations suggère que la correction taphonomique devrait être région-dépendante.
Globalement, les résultats confirment donc la théorie de surchasse mais les incertitudes sont grandes.

Rigueur de l'article

Les auteurs ne déclarent pas de conflit d'intérêt.
Ils concluent en faveur de la théorie de Martin en s'appuyant presque plus sur la longue durée de vie de cette théorie (> 40ans) qui indiquerait sa justesse, ce qui n'est pas un argument scientifique, que leurs résultats chiffrés.
Ils expliquent à plusieurs reprises espérer voir se développer une méthode de reconstitution de la colonisation par l'Homme basée sur la paléontologie et les extinctions. Mais pour qu'une telle méthode soit valide il faudrait d'abord avoir prouvé que les extinctions ont uniquement été causées par l'Homme.

Ce que cet article apporte au débat

Jusqu'ici aucune autre étude n'avait compilé toutes les datations disponibles pour le continent américain dans le but d'établir une chronologie du déclin de la mégafaune. L'approche par déclin plutôt qu'extinction permet de s'affranchir des biais associés à la détermination des dates d'extinction. Les dates de déclin sont déterminées par deux méthodes dont les résultats sont comparés : l'analyse des intervalles entre les datations et celle des fréquences. Les résultats apportent du poids à la théorie de surchasse de Martin en validant le schéma d'extinction et les dates qu'il proposait. Seul le déclin en Béringie survient avant les estimations de Martin.
Cependant, il convient de garder à l'esprit que cette étude est basée sur de nombreuses hypothèses et les incertitudes obtenues sont grandes.

Remarques sur l'article

Cette étude se concentre sur la chronologie. La dimension spatiale est matérialisée grossièrement par 3 régions distinctes mais gagnerait peut-être a être analysée plus finement.

Publiée il y a environ 4 ans par J. Degen.
Dernière modification il y a environ 4 ans.
Article : Test of Martin’s overkill hypothesis using radiocarbon dates on extinct megafauna
  • Auteurs
    Todd A. Surovell, Spencer R. Pelton, Richard Anderson-Sprecher, Adam D. Myers
  • Année de publication
    2015
  • Journal
    Proceedings of the National Academy of Sciences
  • Abstract (dans sa langue originale)

    Following Martin [Martin PS (1973) Science 179:969–974], we propose
    the hypothesis that the timing of human arrival to the New
    World can be assessed by examining the ecological impacts of a small
    population of people on extinct Pleistocene megafauna. To that end,
    we compiled lists of direct radiocarbon dates on paleontological
    specimens of extinct genera from North and South America with
    the expectation that the initial decline of extinct megafauna should
    correspond in time with the initial evidence for human colonization
    and that those declines should occur first in eastern Beringia, next in
    the contiguous United States, and last in South America. Analyses of
    spacings and frequency distributions of radiocarbon dates for each
    region support the idea that the extinction event first commenced in
    Beringia, roughly 13,300–15,000 BP. For the United States and South
    America, extinctions commenced considerably later but were closely
    spaced in time. For the contiguous United States, extinction began at
    ca. 12,900–13,200 BP, and at ca. 12,600–13,900 BP in South America.
    For areas south of Beringia, these estimates correspond well with the
    first significant evidence for human presence and are consistent with
    the predictions of the overkill hypothesis.

  • Identifiant unique
    10.1073/pnas.1504020112
  • Accéder à la référence
  • Apparait dans la controverse
    L’Homme est-il responsable des extinctions de la mégafaune au Pléistocène ?
  • Comment les contributeurs jugent la qualité scientifique de cette référence :

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