Les effets nets de l'écotourisme sur la survie des espèces menacées
Le but premier de la conservation est de maintenir la biodiversité, notamment en minimisant les extinctions d'espèces. Les aires publiques protégées sont au cœur du dispositif tandis que des mesures de conservation sur d'autres territoires s'intensifient, ce qui n'empêche pas les extinctions de se poursuivre. La répartition des fonds est la principale barrière à la conservation, puisque l'acquisition foncière repose sur le financement écotouristique et politique. Jusqu'à 84% des fonds reçus par les parcs nationaux proviennent de l'écotourisme et parmi les 360 espèces de mammifères, d'oiseaux et grenouilles menacées dont les données sont disponibles, l'écotourisme finance la conservation jusqu'à 66% des individus restants et jusqu'à 99% des habitats restants. L'objectif est de quantifier les impacts positifs et négatifs de l'écotourisme sur la conservation des espèces menacées à travers une analyse de viabilité des populations, afin d'avoir des mesures standards comparables.
Les analyses de viabilité des populations (PVAs) sont des modèles mathématiques discrets prédisant les tailles de population et la structure des individus des espèces par génération. Les paramètres nécessaires sont: la taille de la population, le sexe ratio, la mortalité, la fécondité, la dispersion interne et externe par classe d'âge dans chaque sous-population mesurés empiriquement. Les effets des fonds sur la conservation et les impacts écologiques doivent donc être convertis en ces paramètres pour les PVAs (tableau 1).
Neuf espèces menacées ont été sélectionnées selon les critères: avoir été soumise à une PVA après l'an 2000 et que les paramètres nécessaires à la répétition de la PVA soient disponibles, être une espèce attractive pour l'écotourisme et qu'il existe des données quantitatives publiées indépendamment sur les effets du financement de la conservation et les impacts écologiques.
Des VPAs ont été exécutées de nouveau incluant simultanément tous les effets de l'écotourisme.
Parmi les 9 espèces, 21 sous-populations sont identifiées. Les trajectoires des sous-populations incorporent les effets nets de l'écotourisme à des niveaux d'intensités différentes (figure 1). L'efficacité de l'écotourisme en tant qu'outil de conservation dépend de chaque cas.
Pour le chien sauvage d'Afrique (fig 1D), le guépard (1E), le gibbon houlock (1B), le lion tamarin doré au Brésil (1F), le grand ara vert et le vautour d'Egypte en Espagne (1G), les effets nets de l'écotourisme sont visibles dans les 10-20 ans, ensuite les populations se stabilisent à des niveaux fixés par l'habitat, la nourriture et la prédation. Pour le gibbon houlock (1B) et le lion tamarin (1F), les populations augmentent seulement à un niveau modéré ou élevé d'écotourisme. L'effet le plus important de l'écotourisme en terme de conservation concerne l'orang-outan qui disparaîtrait selon les prédictions à moins de mettre en place de l'écotourisme intense. Pour ces espèces intensifier l'écotourisme génère un gain positif.
La méthodologie pour le choix des espèces sélectionnées est bien justifiée, et les paramètres des analyses de viabilité des populations sont clairement expliqués.
Ces analyses montrent que le résultat net de l'écotourisme sur la conservation: (1) peut être calculé comme des changements dans le délai d'extinction pour les espèces menacés, (2) peut être négatif ou positif dans l'ensemble (3) diffère entre espèces selon les paramètres de la population et le type d'impact, (4) opère à travers différents mécanismes pour les différentes espèces et sous-populations et (5) est affecté par d'autres effets anthropiques.
Cet article permet d'apporter une quantification standard des effets de l'écotourisme. Cette approche quantitative pourrait être réalisée pour d'autres espèces menacées lorsque les données nécessaires seront disponibles pour exécuter une analyse de viabilité des populations. La mesure de ces paramètres doit donc être une priorité puisque l'écotourisme est de plus en plus recommandé comme outil pour la conservation.
Les analyses ne portent que sur des espèces charismatiques puisque c'est un des critères choisis par les auteurs, de ce fait de nombreux groupes taxonomiques sont écartés.