Nocicepteurs : une revue phylogénétique
Cette revue est une approche phylogénétique de la diversité des nocicepteurs dans le vivant. Les nocicepteurs sont des neuronnes afférants permettant la détection de stimuli nocifs. Cette revue se concentre principalement sur les nocicepteurs cutanés, ces derniers étant les plus largement étudiés chez les métazoaires. Les auteurs distinguent ainsi plusieurs types de nocicepteurs caractérisés par la taille et le niveau de myélinisation des fibres les innervant. Ils distinguent donc 1) les fibres Aß, larges et fortement myélinisées, permettant le sens du toucher ; 2) les fibres Aδ, moins larges et faiblement myélinisées, assurant le sens du toucher et pouvant être activées par de très fortes pressions mécaniques ; et 3) les fibres C fines et non myélinisées, jouant un rôle majeur dans la nociception mécanique, thermique et dans le sens du toucher.
Les auteurs de cette revue présentent en détail les preuves scientifiques de la présence de différents types de fibres et récepteurs nociceptifs associés dans plusieurs clades du vivant. Les études citées en référence tendent à prouver une importante hétérogénité dans les mécanismes de nociception. Cette diversité est tout dabord constaté à l'échelle anatomique, les invertébrés ne possédant par exemple pas de fibres nociceptives myélinisées (Aß et Aδ). Tous les organismes ne sont pas égaux en terme de capacité de nociception, certains stimuli pourtant nocifs à un organisme, peuvent ne pas être détectés comme tels du fait de l'absence des récepteurs membranaires permettant l'induction du signal relayé par le neuronne nocicepteur. Les Mollusques par exemple, sont signalés comme insensibles aux stimuli nocifs chimiques (acides et basiques); les cnidaires ne présentent de réponse qu'aux stimuli mécaniques ; et les invertébrés dans leur ensemble ne détectent pas les stimuli thermiques nocifs froids (absence de réaction aux températures jusqu'à -7 °). Cette revue souligne donc l'importante variabilité phylogénétique des capacités de nociception, tant en terme de diversité que de finesse des signaux perçus.
Cette revue se concentre uniquement sur les mécanismes de nociception et n'aborde pas la notion de douleur qui nous intéresse. Elle soulève néanmoins un point très important qui est celui de la diversité des mécanismes de nociception entre les branches du vivant. La douleur étant directement induite par la nociception, cette revue permet de questionner la validité des approches par analogie utilisées dans la détermination du ressenti de la douleur. Les importantes différences d'organisation structurelle des systèmes nerveux et donc des mécanismes relayant les signaux nocifs, représentent un obstacle de taille à la validité de cette méthode. Quelle crédibilité pouvons nous assurer aux approches par analogie dans la mesure ou le mécanisme biologique même à l'origine de la douleur est sensiblement différent entre vertébrés et invertébrés ?