Titre de l'article :

Nociception ou douleur chez un Crustacé Décapode ?


Introduction à l'article :

Cet article discute de la différence entre la nociception et la perception de la douleur telle que décrite chez les Mammifères pour l'ensemble des autre taxa du règne animal. Bien que différentes expériences aient été réalisées sur des organismes Vertébrés, comme par exemple chez les poissons, peu ont été faites sur des organismes Invertébrés. Or, la perception de la douleur étant considéré comme un mécanisme bénéfique à la survie des organismes et sélectionné au cours de processus évolutifs, elle serait supposément présente chez l'ensemble des organismes mais à des niveaux de perception différents. L'objectif de cet étude est de mettre en évidence des réponses spécifiques de perception à la douleur via des stimuli chimiques et mécaniques chez la crevette rose (Palaemon elegans) afin d'identifier si la réponse observée traduit ou non plus d'une simple nociception.

Expériences de l'article :

Deux traitements successifs ont été réalisés au niveau d'une antenne des individus afin de déterminer si Palaemon elegans perçoit la douleur ou non. 8 groupes d'expériences contenant chacun 18 individus ont été prélevés en milieu naturel et transportés en laboratoire dans des bassins d'observation contenant de l'eau de mer pour subir chacun des traitements. Le premier traitement consiste en une exposition ou non au benzocaïne 2%, un anesthésiant, afin d'observer si la réponse avec ou sans benzocaïne aux stimuli est similaire ou non. Le second traitement consiste à appliquer un stimulus chimique (NaOH ou acide acétique) ou mécanique (pincement), toujours au niveau des antennes, et d'observer le comportement de l'animal selon le traitement appliqué sur différents points : mouvement général, mouvements réflexes au niveau de la queue, nombre de fois où l'individu a toiletté ses antennes traitées ou non et nombre de fois où l'individu a frotté ses mêmes antennes contre les parois du bassin.

Résultats de l'article :

Suite au premier traitement, seul le nombre de fois où l'antenne traitée à été toilettée est significativement supérieur dans le cas où l'anesthésiant a été appliqué, comparé aux cas où il n'y avait que de l'eau de mer ou par rapport à l'antenne non traitée. Les autres paramètres comportementaux observés n'ont pas présenté de différences significatives avec ou sans anesthésiant, ni selon l'antenne traitée ou non.
Suite aux second traitement, les individus ayant été traités à l'eau de mer précédemment ont fait davantage de mouvements réflexes avec leur queue que ceux traités avec l'anesthésiant. Ces mêmes individus ont aussi significativement plus toiletté leur antenne traitée par stimuli chimique ; il n'y a pas de différence significative quand l’anesthésiant est utilisé. En revanche, dans le cas où l'antenne est traitée par un stimuli mécanique, il n'y a pas de différences significatives entre les antennes traitées ou non, ni selon le traitement à l'eau de mer ou à l'anesthésiant.

Ce que cet article apporte au débat :

Cet article montre que, selon le phénomène comportemental étudié, il est plus ou moins facile de déterminer si un Crustacé Décapode ressent plus que de la nociception. Si l'on s'intéresse uniquement aux mouvements produits par la queue selon les traitements, on ne peut en déduire plus que de la nociception. En revanche, l'action répétée de toilettage des antennes traités par stimuli chimiques peuvent supposer une stratégie de réponse à la douleur semblable aux stratégies observées chez des organismes Vertébrés tels que des poissons ou des amphibiens. Des études plus poussées doivent être réalisée afin de déterminer clairement si les Invertébrés ressentent effectivement de la douleur, potentiellement à un niveau différent des autres organismes d'autres taxa, mais assez significatif pour être considéré différemment de la nociception.

Remarques sur l'article :

Bien que la méthodologie et le protocole semblent tout à fait valides, on peut se demander si d'autres stimuli chimiques auraient donné des résultats semblables ou différents. De même, il est possible que la nociception ou la perception de la douleur aient une sensibilité différente ailleurs que sur les antennes, comme par exemple au niveau des podes ou des pièces buccales.

Publiée il y a presque 5 ans par L. Bergeon.
Dernière modification il y a presque 5 ans.