L'aggravation du risque d'inondation en Tunisie : éléments de réflexion
Les inondations ont, à plusieurs reprises au cours de l’histoire, impacté fortement la Tunisie. En particulier, celles après les années 1950 sont décrites. Comprendre les éléments aggravant la vulnérabilité des villes et des humains face aux crues est essentiel. Surtout dans un contexte de changement climatique où on se questionne sur la tendance des précipitations. Une certitude est que les changements hydrologiques causés par une urbanisation en expansion et diverses actions d’aménagement ne font qu’aggraver cette vulnérabilité.
L’étude des changements hydrologiques et de l’augmentation des enjeux hydrologiques en zones inondables semble indispensable pour mieux comprendre la recrudescence des inondations dévastatrices. Deux aspects majeurs des changements hydrologiques sont développés, celui de la diminution de la débitance des cours d’eau et celui de l’impact de l’urbanisation sur le ruissellement et les écoulements.
Quels sont les constats provenant des expériences vécues lors des inondations ?
Les conséquences morphodynamiques des inondations sont diverses : décapage des horizons supérieurs fertiles du sol, accélération du phénomène de ravinement, élargissement des lits et dépôts importants de sédiments. Les sédiments charriés lors des grandes crues constituent une menace pour les ouvrages de rétention (colmatage des barrages ou lacs collinaires).
Le barrage, comme celui de Sidi Salem, permet l’alimentation en eau potable, l’irrigation, la production d’hydroélectricité et surtout la protection de la basse vallée face aux crues grâce au laminage des débits de pointe. Mais la mise en service du barrage a eu des conséquences négatives (diminution de la section mouillée, réduction de la débitance, développement d’une ripisylve) qui augmentent le risque d’inondation. C’est pourquoi des dégâts post-crues aussi importants qu’avant le barrage peuvent être observés, or le débit est bien moindre (figure 8).
Tout d’abord, le réchauffement climatique ne semble pas influer sur les précipitations de manière significative. Cependant, l’action de l’Homme au cours des dernières décennies a augmenté les risques d’inondation. La diminution de la débitance explique la recrudescence des débordements. Le phénomène d’imperméabilisation des sols augmente le volume d’eau ruisselé. De plus, l’urbanisation entraîne une augmentation des vitesses d’écoulement et une réduction des temps de réponse à cause, entre autres, de l’artificialisation du réseau hydrographique naturel. Les ouvrages de protection contre les inondations comme les digues ne sont pas toujours efficaces. En particulier lorsque ces aménagements sont perpendiculaires à la pente topographique, car ils bloquent les écoulements qui s’accumulent et peuvent inonder les secteurs situés en amont. Ces ouvrages favorisent l'oubli du danger, car ils sont considérés comme des moyens sûrs pour lutter contre les inondations.
Cet article a été soumis à deux relecteurs et à des critiques de plusieurs collègues de l'auteur.
Cet article a été publié dans Physio-Géo, revue sur des thématiques liées à la géographie physique et aux problèmes d'environnement. Cette revue a un éditeur en chef et a obtenu le label DOAJ.
Il ne semble avoir aucun conflit d'intérêt.
Cet article permet de donner un avis critique sur les conséquences du changement climatique, argument que l’on a souvent entendu pour expliquer l’augmentation des crues et qui a permis aux décideurs de se décharger de toute responsabilité. Le réchauffement climatique est donc une fausse excuse pour ne pas agir. Au contre, il est de plus en plus essentiel de prendre en compte tous les éléments pouvant impacter les crues. Par exemple, des barrages pour diminuer le débit de pointe ont été érigés et il y a toujours des dommages considérables même après la diminution du débit. Ceci est du au phénomène de rehaussement du lit par l’accumulation des sédiments qui n'a pas été pris en compte (cas des crues de 1973 et de 2003). L’évolution récente de l’occupation des sols, notamment l’expansion urbaine, constitue ici la cause principale de la récurrence accrue des inondations catastrophiques. Une des solutions envisagées serait d’avoir un Plan de Prévention du Risque Inondation (PPRI) comme en France.
Je trouve que cet article est intéressant car il cite de nombreuses références, mais l'auteur ne prend pas débat sur des sujets dont il n'est pas expert (comme le cas du réchauffement climatique). Il ne perd pas du point de vue le sens de son article et nous donne des éléments de réponse et des références si on souhaite aller plus loin, comme le cas du réchauffement climatique, c'est à nous d'aller se renseigner avec les références. Il ne prend pas de position sans argument fondé et épistémologique.
En Tunisie, le phénomène inondation est ancien. À travers l'histoire, on compte par dizaines le nombre de fois où des régions ont été touchées. Les événements les mieux décrits et les mieux connus, pour la plupart encore dans la mémoire des gens, sont ceux enregistrés depuis le début du siècle passé et notamment après les années 1950. Les inondations de 1969 (tout le pays, et notamment le centre et le Nord), 1973 (moyenne et basse Medjerda), 1982 (Sfax), 1990 (Région de Sidi Bouzid), 1995 (Tataouine), 2003 (Grand-Tunis), 2007 (Sabbalet Ben Ammar), 2009(Redayef)… sont autant d'épisodes qui marqueront pour longtemps les chroniques hydrologiques du pays.
Les extrêmes pluviométriques sont-ils de plus en plus récurrents, ce qui expliquerait les gros dommages provoqués par les inondations depuis cinq ou six décennies ? Difficile de trancher sur cette interrogation, d'autant plus que dans la majorité des cas, on ne dispose pas de chroniques suffisamment longues pour déceler d'éventuelles ruptures de stationnarité dans les séries pluviométriques. Devant l'incertitude scientifique qui plane sur la question des changements climatiques d'une manière générale, et tout particulièrement au sujet de leur impact sur les tendances pluviométriques, un élément apparaît néanmoins certain : les changements hydrologiques inhérents à une urbanisation qui se fait à outrance et aux diverses actions d'aménagement, parfois imprudentes, ne cessent d'augmenter la vulnérabilité de nos villes et de nos espaces face au risque d'inondation.