Titre de la review

Les poissons peuvent-ils réellement ressentir la douleur ?

Résumé de la review

"Nulle-part le truisme 'la structure définit la fonction' n'est plus approprié que pour le cerveau. L'architecture de différentes régions du cerveau détermine les types de calculs qui peuvent y être effectués et peut dicter si une région particulière peut prendre en charge la conscience subjective." Buzsaki (2007). Cette citation sert d'ouverture à la revue d'article de Rose et al.(2014). Ces auteurs proposent ici une analyse de différentes études suggérant la présence de douleur chez les poissons et réfutent ces résultats en se basant sur des preuves neuro-anatomiques.
Si le sujet de cete revue dévie de la question qui nous intéresse en faisant des vertébrés aquatiques l'objet central de son étude, elle souligne un certain nombre d'arguments largement utilisés par les opposants à l'idée de la perception de la douleur par les invertébrés. Les auteurs de l'étude se fendent même d'un court paragraphe soulignant que la majorité des conclusions qu'ils tirent sur le ressenti de la douleur par les poissons sont également applicables aux invertébrés. Les principaux arguments sur lesquels les auteurs de cette revue se basent pour contester les résultats des études analysées reposent sur l'absence des structures connues pour être impliquées dans la perception de la douleur chez l'humain (absence de cortex cérébral, rareté ou absence de fibres C) et sur l'incapacité des auteurs plaidant pour la présence de douleur chez les poissons et invertébrés à appliquer une définition stricte de 'la douleur' ( donc différencier réflexes nociceptifs de réactions liés à la perception de douleur). Ils dénoncent également la tendance des auteurs en faveur de la perception de douleur par les poissons et invertébrés à utiliser des stimuli "non-naturels" (chocs électriques, brûlures chimiques) pour déclencher des réactions chez leurs modèles biologiques. Rose et al. proposent que des stimuli plus proches de ceux réellement expérimentés par les organismes modèles dans leur milieu naturels ne déclencheraient probablement pas les mêmes réactions.
Enfin, les auteurs questionnent la validité des approches motivant les différents auteurs qu'ils critiquent, soulignant que l'étude de la perception de la douleur devrait être basée sur des indicateurs objectifs plutôt que sur des standards s'appuyant sur des sentiments.

Rigueur de la review

Le travail de revue à la base de cet article est particulièrement minutieux, comme en attestent la pluralité des sources utilisées et la diversité des disciplines scientifiques impliquées. Toutefois, certains raccourcis malheureux dans les citations d'auteurs tels qu'Elwood et col. font peser un doute quant à l'impartialité des auteurs de cette revue. En effet, les conclusions attribuées aux études d'Elwood (lesquelles sont analysées en tant que références de cette controverse) ne sont pas celles qui sont réellement proposées par cet auteur et ses collaborateurs (cf Elwood (2019) pour une réponse de l'auteur). De plus, l'ouverture et la conclusion préconisant une approche d'anatomie comparative pour l'étude de la douleur, font totalement abstraction de la possibilité que d'autres mécanismes neuronaux que ceux connus chez l'humain permettent le ressenti de douleur.

Ce que cette review apporte au débat

Rose et al. soulignent avec un raison un certain nombre de biais impactant les études sur la douleur chez les invertébrés. Parmi ceux-ci, l'utilisation de chocs électriques comme stimuli aversifs semble être un obstacle majeur à la discrimination entre réflexes nociceptifs et réaction à la perception de douleur. Il est possible que l'influ électrique entraîne une dépolarisation des neurones et des réactions de tétanie musculaire ou d'autres modifications comportementales associables à la perception. il paraît toutefois difficile d'établir un protocole comportant des stimuli aversifs plus semblables à ceux rencontrés par les différents modèles biologiques dans leur milieu naturel sans risquer le déclenchement de réflexes préventifs associés à la nociception (réaction de défense contre les prédateurs, etc...).

Publiée il y a plus de 4 ans par J.L. Claret.
Dernière modification il y a plus de 4 ans.
Review : Can fish really feel pain?
  • 1 1
  • Auteurs
    J D Rose, R Arlinghaus, S J Cooke, B K Diggles, W Sawynok, E D Stevens, C D L Wynne
  • Année de publication
    2014
  • Journal
    Fish and Fisheries
  • Abstract (dans sa langue originale)

    We review studies claiming that fish feel pain and find deficiencies in the methods used for pain identification, particularly for distinguishing unconscious detection of injurious stimuli (nociception) from conscious pain. Results were also frequently misinterpreted and not replicable, so claims that fish feel pain remain unsubstantiated. Comparable problems exist in studies of invertebrates. In contrast, an extensive literature involving surgeries with fishes shows normal feeding and activity immediately or soon after surgery. C fiber nociceptors, the most prevalent type in mammals and responsible for excruciating pain in humans, are rare in teleosts and absent in elasmobranchs studied to date. A‐delta nociceptors, not yet found in elasmobranchs, but relatively common in teleosts, likely serve rapid, less noxious injury signaling, triggering escape and avoidance responses. Clearly, fishes have survived well without the full range of nociception typical of humans or other mammals, a circumstance according well with the absence of the specialized cortical regions necessary for pain in humans. We evaluate recent claims for consciousness in fishes, but find these claims lack adequate supporting evidence, neurological feasibility, or the likelihood that consciousness would be adaptive. Even if fishes were conscious, it is unwarranted to assume that they possess a human‐like capacity for pain. Overall, the behavioral and neurobiological evidence reviewed shows fish responses to nociceptive stimuli are limited and fishes are unlikely to experience pain.

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  • Apparait dans la controverse
    Douleur ou nociception : que perçoivent réellement les Invertébrés ?
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