La restauration des mangroves chinoises, envahies par des espèces non-natives, par l'implantation d'espèces non-natives
Le contrôle écologique des plantes exotiques est une thématique importante mais délicate à mettre en œuvre. Une des méthodes appréciées est le contrôle de remplacement basé sur la compétition interspécifique et la succession de communautés de plantes. Dans cette étude, les scientifiques ont cherché des plantes capables de se substituer à l'espèce invasive S. alterniflora et de rétablir la flore native des mangroves. Pour cela, ils ont utilisé d'autres plantes non-natives, jugées non dangereuses pour l'écosystème (évitant une invasion secondaire) mais connues pour leur inhibition du développement de S. alterniflora : S. apetala et S. caseolaris.
Pour cette étude, les chercheurs ont travaillé sur le terrain pendant 5 ans. Ils ont observé et quantifié le développement des plantes non-natives en fonction de leur association : espèce invasive seule (S. alterniflora) ; espèce invasive et une espèce de contrôle (S. apetala) ; espèce invasive et les deux espèces de contrôle (S. apetala et S. caseolaris). Les scientifiques ont ensuite calculé différents indices pour pouvoir estimer le développement des plantes dans chacun des cas (survie des plantes, intensité lumineuse, biomasse, taux de croissance relative, chimie du sol).
Les deux contrôles ont un impact significatif sur la densité de S. alterniflora, qui diminue drastiquement, de même que la biomasse et le taux de croissance relative. Cela témoigne que les contrôles ont une plus grande compétitivité que S. alterniflora lorsque ces espèces coexistent. Cette évolution est corrélée à une diminution de la luminosité (due à la croissance rapide des espèces contrôles qui vont former une forêt ombragée), à un enrichissement nutritif des sols et à la restauration de plantes de mangrove natives.
Lorsque S. alterniflora s'installe dans une mangrove abîmée, elle croît rapidement et ferme la canopée, inhibant la croissance des plantes natives de mangrove. Les espèces contrôles sont des pionnières et croissent plus vite que l'espèce invasive dont elles inhibent la croissance (accès à la lumière). Mais ces espèces s'inhibent elles-même en empêchant la germination de leurs propres graines, ce qui permet aux espèces natives de mangrove de revenir.
Cette étude s'intéresse à l'éradication d'une espèce invasive (non-native) via l'utilisation d'autres espèces non-natives. Cette approche semble bien fonctionner mais l'impact qu'ont ces autres espèces sur le reste de l'écosystème est assez peu détaillé. De plus, si ces espèces ne font pas une seconde invasion dans la région étudiée, leur impact dans une autre localité peut être sous-estimé.
Cet article montre qu'il est possible d'utiliser des espèces non-natives pour contrôler d'autres espèces non-natives invasives et pour rétablir des écosystèmes, sans amener d'autres invasions. C'est donc une étape importante dans la compréhension des effets des espèces non-natives sur un nouvel écosystème, et cela montre qu'il est possible de contrôler des espèces invasives par des moyens naturels et peu coûteux. Les espèces non-natives ne sont donc pas toutes délétères mais peuvent conduire à des bénéfices écologiques qu'il ne faut pas sous-estimer (restauration de communautés natives)
In coastal China, the exotic invasive Spartina alterniflora is preventing the establishment of native mangroves. The use of exotic species, control of exotic plant invasion, and restoration of native plant communities are timely research issues. We used exotic Sonneratia apetala Buch.-Ham and S. caseolaris (L.) Engl. to control invasive Spartina alterniflora Loisel through replacement control for five years, which concurrently promoted the restoration of native mangroves. This process includes three stages. I: In a mangrove area invaded by S. alterniflora, exotic S. apetala and S. caseolaris grew rapidly due to their relatively fast-growing character and an allelopathic effect. II: Fast-growing S. apetala and S. caseolaris eradicate S. alterniflora through shading and allelopathy. III: The growth of native mangrove was promoted because exotic plant seedlings cannot regenerate in the understory shade, whereas native mesophytic mangrove plants seedlings can grow; when the area experiences extreme low temperatures in winter or at other times, S. apetala dies, and native mangrove species grow to restore the communities. This model has important implications for addressing the worldwide problems of “how to implement the ecological control of invasion using exotic species” and “how to concurrently promote native community restoration during the control of exotic invasion”.