Identification moléculaire taxonomique en l'absence d'un "barcoding gap" : un test avec la flore endémique du hotspot océanique des Canaries
La mise en place d'un protocole de routine qui utilise le barcoding d'ADN est important en biologie pour :
La recherche d'un code-barres universel pour les plantes est encore en cours (contrairement aux animaux : la COI). Il a été proposé l'utilisation simultanée de deux locus, rbcL et matK. Aussi, l'existence d'un "barcoding gap" chez les plantes est bien plus rare que chez les animaux (le pouvoir de discrimination est donc également plus faible que chez les animaux).
Chez les plantes, les difficultés de discrimination proviennent de la présence courante de taxons très proches génétiquement (due à de fort taux de spéciation) et de phénomènes d’hybridation et/ou introgression, ce qui diminue les distances génétiques entre les taxons.
Les iles Canaries présentent une forte diversité endémique (nombreux cas de spéciations récentes). C'est donc un cas d'étude intéressant pour tester l’efficacité des méthodes d'identification ADN.
Les auteurs tentent ici d'évaluer l'efficacité du code-barres rbcL-matK pour un échantillon d'angiospermes endémiques. Ils répondent à trois questions principales :
Pour ce faire, les auteurs tentent d'identifier 140 populations, correspondant à 23 familles, 35 genres et 60 taxons endémiques des iles Canaries.
Principaux résultats de l'étude :
Cet article me semble rigoureux. Il n'y aucune remarque à faire à ce sujet.
Cet article montre, une fois de plus (voir Justi et al. 2014[2]), que la méthode basée sur les distances génétiques entre taxons ne permet pas toujours de distinguer des espèces (lorsqu'il n'existe pas de "barcoding gap"). Aussi, il montre que la méthode basée sur les caractères génétiques est plus efficace que la méthode des distances[1], et met ainsi en évidence que l'absence d'un "barcoding gap" n'est pas indispensable à une discrimination moléculaire à l'échelle spécifique. Il montre que la méthode de barcoding d'ADN peut être efficacement utilisée pour la discrimination moléculaire et la découverte de nouvelles espèces chez les plantes si l'on utilise la méthode la plus adaptée : celle basée sur les différences de caractères moléculaire.
We use a comprehensive subset of Canarian angiosperms corresponding to 23 families, 35 genera and 60 Canarian endemic taxa to test whether this flora is suitable to taxonomic identification with the two proposed plant DNA
barcode sequences and whether these sequences may reveal the existence of cryptic species overlooked by morphology.
The rate of discrimination success between the insular congeneric samples using the rbcL+matK combination
and a ‘character-based’ approach (where we use only the combination of nucleotide positions in an alignment that
allows unambiguous species identification) is higher (82.29%) than that obtained with the ‘distance-based’ approach
(80.20%) used by the CBOL Plant Working Group in 2009 and also when compared with tests conducted in other floras.
This suggests that the molecular identification of the Canarian endemic flora can be achieved as successfully as
in other floras where the incidence of radiation is not as relevant. The facts that (i) a distance-based criterion was
unable to discriminate between congeneric and conspecific comparisons and (ii) only the character-based discrimination
criterion resolved cases that the distance-based criterion did not, further support the use of a character discrimination
approach for a more efficient DNA barcoding of floras from oceanic islands like the Canaries. Thus, a
barcoding gap seems not to be necessary for the correct molecular characterization of the Canarian flora. DNA barcodes
also suggest the possible existence of cryptic taxa to be further investigated by morphology and that the current
taxonomic status of some of the taxa analysed may need revision.